LA MITIDJA OCCIDENTALE


LE RELIEF

La Mitidja est une dépression longue d'environ 100 km sur 15 à 20 km de large resserrée entre l'Atlas Tellien au sud, et une chaîne de collines au Nord, le Sahel. A l'extrême est, elle est largement ouverte sur la mer, sur une trentaine de kilomètres. Dans sa partie ouest, les collines du Sahel entrent au contact du massif montagneux du CHENOUA (905 m) et rejoignent, au plateau de Fadjana, les premières hauteurs de I'Atlas (Djebel Thiberrarine au sud, 853 m).

C’est à cette extrémité ouest que se trouve MARENGO.

L'Atlas tombe assez abruptement sur la plaine. Dans sa partie occidentale jusqu’à EL-AFFROUN, il est bordé d'une série de sommets de roches éruptives (andésite) en dos de chameau. En bordure de cette zone éruptive seront ouvertes des carrières. La Mitidja est située dans la zone d'activité séismique qui va du Maroc à la Sicile en passant par la plaine du Chéliff.

La plaine descend an pente douce du sud au nord, de l’atlas vers les collines. Cinquante mètres seulement entre AMEUR-EL-AÏN et le fond du lac Halloula. Les cours d’eau qui viennent de l'Atlas ont déposé leurs allusions, grossières et perméables dans la partie sud, fines et imperméables dans la partie Nord. Des sondages à plus de 100 m de profondeur n'ont pas atteint les couches anciennes.

La chaîne de collines, de médiocre hauteur (268 m au point le plus haut) constitue un obstacle à l'écoulement des eaux vers la mer. De l'extrémité ouest à Alger, sur 70 km, la plaine ne communique avec la mer qu'en deux points : à l’extrémité ouest par l’oued Nador et 40 km plus loin par le MAZAFRAN. Elle est comparable à une immense gouttière stockant les eaux, qui s'écoulent difficilement. C'est ce qui explique qu'elle toit normalement occupée par de grandes étendues marécageuses et lacustres.

De plus, l'eau infiltrée dans le haut de la plaine réapparaît au contact des alluvions imperméables. Des talwegs descendant de l'Atlas à sec pendant l'été, se remettent à couler plus bas, dans la zone des sources. Même en dehors des parties marécageuses le niveau hydrostatique affleure le sol. Dans les fermes, au nord de BOURKIKA et d’Ameur-el-Aïn, les puits ont de l'eau à 2 ou 3 m, parfois moins. Il y a même des puits artésiens dans cette partie de la plaine, dont celui de la forêt Sidi-Slimane.


LA COTE

En bordure des collines du Sahel de Tipasa, elle est pittoresque, rocheuse et découpée en petites anses. Entre le Sahel et le cap Ras-el-Amouch, extrémité du Chenoua, elle forme une admirable baie, très ouverte, où le Nador vient se jeter. Ses alluvions ont formé une plage de 3 km, entre MATARESE (Plage Raynaud-Tipasa) et Chenoua-Plage. La côte est inhospitalière ; elle ne compte pas d'abri sûr aux vents du Nord et de l'Est.


L’HYDROGRAPHIE

Le régime des pluies est irrégulier. De violents orages provoquent des crues parfois importantes à partir de la mi-septembre ou au printemps. La plaine est littéralement sous l'eau. Les alluvions entraînées par les eaux constituent des cônes de déjections assez importants au débouché sur la plaine. Dans leur cours moyen, les oueds divaguent, chantent de lit, entassent sur leurs rives des masses de terre énormes qui, en compartimentant la plaine, la rendent plus difficile à drainer. En 1846, à la suite de fortes précipitations, le BOU-ROUMI et l'Oued-Djer confondirent leurs eaux.

Au nord, de nombreux ravins descendent du Sahel. Si leur débit est nul ou presque pendant la saison chaude, ils apportent à la plaine leur quote-part d'eau pendant les pluies.

A peu de distance du déversoir ouest se trouve un seuil de 68 mètres, qui sépare la cuvette de la plaine du bassin de l'Oued Bourkika qui deviendra en aval l'oued Nador. Les eaux rassemblées dans cette cuvette, ne trouvant pas d’exutoire, forment un lac en grande partie asséché aujourd'hui le lac Halloula, qui sera un des principaux personnage de la tragédie coloniale de l'ouest Mitidja.

Il mesurait 7 km sur 4 environ, couvrant 1500 à 2000 hectares, le double en hiver. Il était profond de 7 mètres au maximum, de 50 cm à 1 m dans la partie inondable en hiver. Ses eaux pullulaient d'oiseaux aquatiques, cygnes, oies, canards, bécassines, vanneaux, pluviers. Elles étaient poissonneuses et, de plus, donnaient lieu à un commerce florissant de sangsues, alors très employées en médecine en Europe. Ses ri­ves étaient infestées de moustiques, véhicules alors insoupçonnés du paludisme. Le lac arrivait en hiver à quelques kilomètres de Marengo, de Bourkika et d’Ameur-el-Aïn.

A l’ouest, l'Oued Nador, qui traverse le Sahel de Tipasa par une trouée longue de 6 km, est formé par la réunion de plusieurs oueds, dont les principaux sont l'Oued Bou-Yersen, l’Oued Bou-Ardoun, l’Oued Meurad et l'Oued Bourkika. Plus à l'est, l'Oued Djer et l’Oued Bou-Roumi apportent leurs eaux au Mazafran. Autrefois, l’Oued Djer se jetait dans la cuvette du lac.


LE CLIMAT

L'été est chaud, le printemps et l'automne peu marqués, l'hiver relativement doux. Les gelées blanches sont la règle par temps clair jusqu'en mars-avril. Elles sont redoutées lorsqu'elles ont lieu après la débourrage de la vigne.

En hiver, les vents dominants soufflent du secteur ouest et sont humides. Humides également les vents d'été qui viennent surtout du nord est et de l'est mais qui n'apportent pas la pluie, au contact du continent chaud. Ils entretiennent une atmosphère difficilement supportable, mais favorable à la végétation.

La Mitidja est souvent noyée de brume le matin, même au gros de l'été. Ce fait causa, le 29 juin 1830, une méprise qui aurait pu être fatale à nos troupes. Trompé par le brouillard qu'il prenait pour la mer, le général Desprez plaça son dispositif le dos à Alger qu'il voulait attaquer. L’armée se fourvoya. Heureusement pour les Français, les Turcs ne surent pas profiter du désordre et des fatigues qui accompagnaient le changement de cap.

Lorsque la chaleur a chassé les brumes du matin, elle devient intolérable. Elle est plus supportable quand le vent vient du nord. Le vent du sud, heureusement peu fréquent, est un vent brûlant et desséchant qui descend de l’Atlas. Il peut souffler sans répit plusieurs jours, transformant le pays en une fournaise, et cause alors des dégâts importants parfois irrémédiables aux cultures, notamment à la vigne et aux arbres. "Le sirocco charrie du feu disait Maupassant".

Les pluies sont irrégulières d’une année à l’autre à l'autre et pour un même mois. A Alger, il est tombé en 1847 -48 1462 mm d’eau, en 1848-49 683 mm, et en 1849-50 522 mm, variant ainsi du simple au triple. Il pleut très peu ou pas du tout les mois d'été. Les précipitations ont lieu de mi-septembre à mars ou avril, souvent sous forme d’orages. Des pluies torrentielles peuvent atteindre et même dépasser 100 mm en 24 heures. Elles sont alors un puissant agent d'érosion, et sans profit pour la végétation.

MARENGO se situe dans la partie de la plaine la moins arrosée, le Chenoua et le Mont Zaccar formant un écran aux pluies amenées pas les vents amenés du secteur Ouest.
Moyenne annuelle : environ 650 mm.


CULTURE

Cette région, aux terres riches, est favorable aux cultures : agrumes, arbres fruitiers, maraîchage en terrain irrigué ; vigne, tabac, etc… les céréales, les prairies artificielles y viennent bien à condition que les pluies de printemps ne fassent pas défaut.


POPULATION

Au moment de la conquête, la Mitidja occidentale, l'Outhan-es-Sebt, était bornée à l'ouest et au sud par les Beni-Menasser et les Beni-Menad. La plaine elle-même comprenait les Houled-Hamidou, les Beni-Hellal et Zanacra et surtout la tribu guerrière des Hadjoutes, redoutable pour nos soldats et nos colons. Sur les premières hauteurs de l'Atlas, vers El-Affroun, les Soumathas. Le petit massif du Chenoua était occupé par une population berbère pure, les Chenoui.

Toutes ces populations vivaient de quelques cultures, mais surtout d'élevage, moutons, chèvres, chevaux et aussi chameaux, nombreux à cette époque.

Le BEYLIK était le principal propriétaires des terres, qu'il laissait en usufruit à des tenanciers, le plus souvent des tribus, où la propriété était indivise. Le régime foncier était très compliqué, découlant des prescriptions du Coran et d'usages locaux. Les terres étaient le plus souvent mal délimitées, d'où d'interminables contestations. Les Hadjoutes occupaient de vastes terrains concédés par le beylik en compensation des obligations militaires, étant tribu meghzen.